lundi 8 mai 2023

Les Jardins de Touvoie, à proximité du Mans.

 Les jardins botaniques.

Depuis l'origine, les êtres humains ont acquis des connaissances sur les plantes pour l'alimentation, la médecine, la construction et les multiples usages domestiques.
Dans l'Antiquité, plusieurs jardins botaniques sont connus; en Perse les jardins de Mithridate, à Athènes ceux du savant grec Théophraste et du médecin Dioscoride et à Rome ceux d'Antonius Castor, médecin romain.
Au Moyen-Age, les jardins des abbayes et monastères sont dédiés principalement à la culture des plantes médicinales.



A la Renaissance au seizième siècle, on assiste en Europe, particulièrement en Italie, à multiples créations de jardins botaniques, souvent rattachés à des universités, pour l'étude scientifique des plantes, mais aussi pour l'acclimatation de plantes nouvelles importées par les routes commerciales, les explorations terrestres et maritimes.



Quelques exemples des premiers jardins botaniques en Europe:

    - en 1530, à Marbourg (Allemagne), par Euricius Cordus qui fonde une école botanique.

    - vers 1540, à Touvoie, près du Mans, un jardin botanique d'acclimatation est créé par René du Bellay, évêque du Mans, en relation avec Pierre Belon, naturaliste sarthois.

    - en 1544, à Pise (Italie), un jardin créé par un botaniste avec le soutien des Médicis . Il fut visité par le naturaliste sarthois Pierre Belon. C'est le plus ancien jardin botanique au monde encore visible.

    - en 1545 à Florence, à Padoue, jardin cité par Pierre Belon.

    - en 1568 à Bologne.

    - en 1577 à Leyde ( Pays-Bas), un jardin est créé pour l'université de médecine puis développé par le botaniste Charles de l'Ecluse.

    - en 1593, à Montpellier pour les besoins de l'université, c'est le jardin botanique  le plus ancien de France, encore visible.

Près du Mans, le premier arboretum français.

Contemporain des jardins botaniques de Toscane, le jardin de Touvoie qu'on définirait aujourd'hui comme un arboretum, est le premier recensé en France.

René du Bellay (1500-1546), évêque du Mans entre 1535 et 1542) passionné de botanique, créé un jardin botanique dans la propriété du manoir de Touvoie, possession de l'évêché du Mans.
Cette propriété est actuellement située à Sainte Corneille, en limite de Savigné l'évêque.
Mgr René du Bellay s'intéresse à l'acclimatation des plantes dans notre région, autant pour leur intérêt ornemental que pour un usage forestier ou domestique. Toutes ces plantes exotiques parviennent à Touvoie en transitant souvent par l'Italie et principalement par la Toscane où elles ont déjà été importées d'Orient par les voies maritimes vénitiennes ou gênoises.
Pour la fourniture des plantes, René du Bellay utilise ses relations, dont celle de Pierre Belon, botaniste voyageur sarthois qui, au fil des ses voyages et par ses contacts, envoie des plantes à Touvoie. 

Pierre Belon cite ce jardin d'expérimentation dans son ouvrage "Les Remonstrances sur le default de labour et de la coignaissance des plantes...":
"Aussi est encor de ceste heure, nostre estude supportée, de la singulière bonté et libéralité de feu monsieur René du Bellay Evesque du Mans, et duquel autrefois avons receu bienfaicts de nostre jeune age, et non que pour lui avoir communiqué des semences de plusieurs plantes apportées d'Italie et Almaigne, et Flandres, et desquelles encor en durent aucunes, embellissant le jardin de Touvoie, qu'il a édifié pres de la ville du Mans."

Même si on ne connait pas la liste exacte des plantes cultivées à Touvoie, dans plusieurs écrits, il est mentionné la présence de tinus, de chênes verts, de chênes lièges, de caroubiers, arbousiers, platanes d'Orient, de tabac (nicotianae), d'hellebores et bien d'autres plantes. 
Les platanes d'Orient de Touvoie seraient les premiers plantés en France.
D'autres envois peuvent provenir par l'intermédiaire de son frère Jean du Bellay, évêque, diplomate et féru d'architecture qui dispose d'un réseau étendu, notamment avec l'Italie.

Hélas, les travaux de modification des abords du manoir, réalisés par les évêques suivants  peu soucieux du riche patrimoine créé par René du Bellay, amèneront la suppression du jardin botanique de Touvoie, dont il ne reste pas de traces. Le manoir, remanié depuis le seizième siècle, est privé et non visitable.

Le projet d'un jardin botanique royal.

Pierre Belon, qui a visité plusieurs jardins botaniques en Italie et a collaboré à l'arboretum de Touvoie, près du Mans, propose au roi Henri II la création d'un jardin pour l'acclimatation d'essences exotiques. Son projet retient l'attention du roi mais ne peut aboutir, faute de financements. Il essaiera de relancer ce projet auprès de CharlesIX, successeur de Henri II, mais sans pouvoir aboutir.



                                                                                                        Jacques Berteraut